Au risque de l’évaluation… par Marie-José Asnoun
Dès l’école maternelle, l’évaluation, on n’y coupe pas !
Envisagée via un livret d’évaluation (Aide à l’évaluation des acquis en fin d’école maternelle), pour tous les élèves de grande section de maternelle et prévue en trois phases, elle est l’objet d’un rejet massif de la part des parents, des enseignants, des représentants du monde de la petite enfance, de la santé et de l’éducation.
Les trois phases
Entre novembre et décembre, une première phase dite de « repérage » du comportement à l’école, du langage, de la motricité et de la « conscience phonologique », une seconde pour « un entraînement progressif (…) avec les enfants repérés à risques lors de la phase 1 et la troisième qui consiste en un bilan, à la fin de l’année scolaire pour faire le point sur les acquis des élèves. Le livret d’évaluation comporte un protocole très normé en vingt deux fiches. [1]
Le classement des enfants en trois catégories
Selon les scores obtenus, s’établit un classement des enfants en trois catégories : RAS (rien à signaler), « risque» et « haut risque ». Une fiche par élève et par classe est remplie. Ainsi un enfant de 5 ans, obtenant moins de 2 points en comportement à l’école, sera déclaré à « haut risque ».
Cette approche n’est pas sans rappeler l’expertise de l’Inserm en septembre 2005, qui pointait l’insuffisance du « dépistage du trouble des conduites » chez les enfants ou la proposition de novembre 2010, faite par le secrétaire d’État à la justice, J-Marie Bockel, de repérer les troubles du comportement dès 3 ans.
L’école maternelle : une structure de sélection ?
Maintenant, si le signifiant « risque » est remis en cause, le ministère de l’Éducation nationale maintient le repérage des enfants les plus fragiles et les trois temps de l’évaluation pour un repérage précoce de la difficulté scolaire ! [2]
Doit-on s’acharner à procéder à des évaluations du comportement des jeunes enfants, Doit-on mettre en œuvre systématiquement des séances d’entraînement à des apprentissages précoces de conduites adaptatives ?
L’évaluation semblait viser autant la sélection des élèves que celle des établissements avant que soit décidé, face au tollé général, qu’il n’y aura pas de remontée nationale sur le niveau de chaque établissement.
Tout ce lourd dispositif reste pour l’instant facultatif mais jusqu’à quand … ?
L’école maternelle doit-elle se transformer en structure de sélection ?
Une prédiction ravageante
Le marqueur biologique a remplacé les bonnes fées au-dessus du berceau du nouveau-né. À sa suite la prédiction se substitue à la prévention. Une prédiction qui vise le « zéro risque ». Cet impératif transforme le sujet en un sujet « à risque ».
L’évaluer pour le mettre à l’abri du risque ? Que risque-t-il ce petit sujet si ce n’est rencontrer un Autre prédicteur ? Un Autre prédicteur qui ne veut rien savoir de la fonction du désir de l’Autre qui sous les espèces de la figure de la prédiction produit des effets d’angoisse, risque réel pour la vie du sujet.
L’Autre de la prédiction ne veut rien savoir précisément du savoir en devenir de l’enfant.
La psychanalyse, contrairement à l’Autre de la prédiction, suppose à l’enfant un savoir. Elle lui reconnaît un désir de sujet et veut bien avec lui prendre des risques et parier sur le désir et ses surprises !
[1] Vous pouvez consulter les fiches sur le site : www.pasde0deconduite.org/
[2] Le projet est issu des travaux du Dr Michel Zorman, médecin scolaire qui travaille sur ce qui empêche un enfant d’apprendre à lire. Il a montré qu’une mauvaise conscience des syllabes ou un vocabulaire trop étroit étaient prédictifs de difficultés en apprentissage de la lecture. Le ministère a repris ses outils de repérage utilisables en début de grande section de maternelle. Mais la rue de Grenelle a complété ce dispositif par des tests qui élargissent le champ au mathématiques et au comportement des enfants et y a ajouté un bilan de fin d’année.
APPEL DES PSYS CONTRE MARINE LE PEN
Twitter Lacanquotidien
RAFAH EST LIBRE !
Lacan Quotidien Archives
Lacan Quotidien Derniers Numéros
- Lacan Quotidien n° 932 – Fumaroli : la dernière leçon
- Lacan Quotidien n° 931 – « GreekJew is JewGreek » – Joyce, Ulysses
- Lacan Quotidien n° 929
- Lacan Quotidien n° 928 – 2021 Année Trans
- Lacan Quotidien n° 927 – Éric Marty et Jacques-Alain Miller – Entretien sur « Le sexe des Modernes » – Document – Lyon va adopter un budget genré
- Lacan Quotidien n° 926 – Sexualités et symptôme : refoulement, forclusion et démenti par Agnès Aflalo – La loi forclôt l’interpretation par Ricardo Seldes – Sur un article de J. Chamorro par Ramiro Tejo, réponse de Jorge Chamorro – J’entends des voix qui me parlent, film de Gérard Miller et Anaïs Feuillette
- Lacan Quotidien n° 925 – OURAGAN SUR LE « GENDER » ! par Jacques-Alain Miller – D’une époque sans nom par Christiane Alberti – La parodia de los sexos y la ley par Neus Carbonell
- Lacan Quotidien n° 924 – Que par la voie logique par Lilia Mahjoub – Crispr lalangue, crispr lenguaje par Marco Mauas – Una ley revelada par Silvia Baudini – Le Zeitgeist et ses courants : sinthome ou fake news par Pascal Pernot
- Lacan Quotidien n° 923 – Point de capiton par M. Bassols – Politique lacanienne, aujourd’hui et demain par P.-G. Guéguen – De la corrección política y sus vigilantes par L. Seguí – Espagne : la loi sur la transidentité divise les féministes par Diane Cambon pour Marianne
- Lacan Quotidien n° 922 – Monique Wittig, le pouvoir des mots par Deborah Gutermann-Jacquet – Scilicet, donc woke ou lom sans divertissement par Nathalie Georges-Lambrichs – Las seducciones de la voluntad y de la libertad par Jorge Chamorro