Ezer ke negdo – aide-contre – עזר כנגדו
Des Femmes et des Hommes par Marco Mauas
Maureen Dowd, la séduisante journaliste du New York Times, commence sa chronique (1) du 24 Octobre 2011 sur l’Ambassadeur d’Arabie Saoudite à Washington – qui aurait été la cible récemment d’un complot iranien visant à l’assassiner – avec une petite anecdote: « comment, à l’époque où il était un “playboy charmante” [sic], il lui sauva la tête ».
C’est bien sûr une exagération, elle n’aurait sûrement pas été décapitée. S’agit-il d’une métaphore ? Suivons un peu son récit.
Ils, elle et lui, se promènent dans une galerie de luxe à Riyad profitant du plaisir d’être ensemble en ce lieu fastueux. Subitement, ils sont abordés par un groupe d’hommes barbus avec des longues robes : la police religieuse. En désignant Maureen, ils l’interpellent violemment en Arabe. Le jeune gentleman Jubeir, tout en s’employant à sauver son amie jusqu’à finalement obtenir l’éloignement des mutawwa, traduit pour elle : « Ils disent qu’ils peuvent voir le contour de votre corps. » [En anglais c’est plus fort : « They say they can see the outline of your body »]
Maureen Dowd fantasma pour elle-même – c’est le terme précis – qu’ils auraient voulu la décapiter, du moins obtenir une livre de sa chair, dans le meilleur des cas, « because they saw an inch of flesh ».
Au cours de cet épisode, s’est-elle sentie comme « la tapada » des Mille et Une nuits ? Le personnage féminin de la tapada en la compagnie de sa « dueña » dont Cansinos Assens, « maître de Borges », dixit Georgie lui-même, nous dessine les contours, le portrait, parmi tant d’autres femmes de ce livre, dans le prologue à sa superbe traduction des Mille et Une Nuits, un livre « Si vaste qu’il n’est pas nécessaire de l’avoir lu, car il fait partie intégrante de notre mémoire tout comme il appartient aussi à cette nuit. (2) » La tapada, la femme mystérieuse, est l’occasion pour Cansinos de rappeler que l’amour, le vrai amour, n’a aucune relation avec la physiologie, parce qu’il surgit de manière inattendue, extraordinaire, et en situation de conflit avec la loi. « On pouvait à l’époque acheter une belle esclave au marché, mais vous ne pouviez pas posséder celle que vous aviez vue, comme un éclair, au passage, derrière une jalousie, ou celle dont le regard croisé derrière un voile, avait fixé en un instant votre destin » (3).
Voici mon pari. Maureen Dowd, la même rebelle qui écrivit il y a 11 ans son fameux « Freud Was Way Wrong (4) », en jouant méchamment avec le WWW du « Was Will das Weib ? », a rencontré, de manière inattendue un très vieux problème de l’humanité : la femme avec le désir-dessein inconnu, on ne sait pas ce qu’elle veut. Elle-même, rebelle comme elle se plait à être, mais aussi étrangère, autre pour elle-même, aux yeux des hommes dont le langage inconnu, fut (trop?) rapidement traduit.
En sortant du bureau de l’Ambassadeur Adel-al Jubeir, à l’occasion de son dernier entretien avec cet homme qui la sauva, selon elle, de la rage de la police, elle lui demanda son avis sur une peinture qui la regardait face à la porte : « Arab tribesmen riding horses and camels ?». Et lui de répondre : « Its artistic license, he noted with amusement. Camels don’t ride with horses. They ride separetely. Horses go faster and camels go longer. »
Paru dans le N°76 de Lacan Quotidien
Pour découvrir l’article de Maureen Dowd “The Saudi Ambassador of Sangfroid du NYTimes, “There were women who lost their heads over Adel al-Jubeir, back when the Saudi ambassador was a charming playboy. I had the opposite experience. He saved me from losing my head. (…)”Cliquez ici.
(1) Maureen Dowd : « The envoy of sangfroid », IHT, Monday, oct 24, 2011.
(2) Jorge Luis Borges , “Sept Nuits” (1977), Trad Francoise Rosset, La Pleiade, 2010.
(3) Cansinos Assens: “Estudio literario-crítico de “llLas mil y una noches”, en “Libro de las mil y una noches”, Aguilar, Madrid, 1979. Traducci’on Cansinos Assens.
(4) Maureen Dowd: “LIBERTIES; Freud Was Way Wrong”, NYT, 11 /6/2000 cliquez ici.
APPEL DES PSYS CONTRE MARINE LE PEN
Twitter Lacanquotidien
RAFAH EST LIBRE !
Lacan Quotidien Archives
Lacan Quotidien Derniers Numéros
- Lacan Quotidien n° 932 – Fumaroli : la dernière leçon
- Lacan Quotidien n° 931 – « GreekJew is JewGreek » – Joyce, Ulysses
- Lacan Quotidien n° 929
- Lacan Quotidien n° 928 – 2021 Année Trans
- Lacan Quotidien n° 927 – Éric Marty et Jacques-Alain Miller – Entretien sur « Le sexe des Modernes » – Document – Lyon va adopter un budget genré
- Lacan Quotidien n° 926 – Sexualités et symptôme : refoulement, forclusion et démenti par Agnès Aflalo – La loi forclôt l’interpretation par Ricardo Seldes – Sur un article de J. Chamorro par Ramiro Tejo, réponse de Jorge Chamorro – J’entends des voix qui me parlent, film de Gérard Miller et Anaïs Feuillette
- Lacan Quotidien n° 925 – OURAGAN SUR LE « GENDER » ! par Jacques-Alain Miller – D’une époque sans nom par Christiane Alberti – La parodia de los sexos y la ley par Neus Carbonell
- Lacan Quotidien n° 924 – Que par la voie logique par Lilia Mahjoub – Crispr lalangue, crispr lenguaje par Marco Mauas – Una ley revelada par Silvia Baudini – Le Zeitgeist et ses courants : sinthome ou fake news par Pascal Pernot
- Lacan Quotidien n° 923 – Point de capiton par M. Bassols – Politique lacanienne, aujourd’hui et demain par P.-G. Guéguen – De la corrección política y sus vigilantes par L. Seguí – Espagne : la loi sur la transidentité divise les féministes par Diane Cambon pour Marianne
- Lacan Quotidien n° 922 – Monique Wittig, le pouvoir des mots par Deborah Gutermann-Jacquet – Scilicet, donc woke ou lom sans divertissement par Nathalie Georges-Lambrichs – Las seducciones de la voluntad y de la libertad par Jorge Chamorro