L’audience du procès contre le film Le Mur par Dominique Holvoet

Madame Judith Miller, les présidents de l’ECF, de l’Eurofédération, de l’ACF Belgique, de nombreux collègues du Courtil (Tournai), de l’Antenne (Bruxelles), ou encore de la Coursive (Liège) de l’ECF, belges et français, de la NLS : ils étaient tous là, près d’une centaine massés dans la salle E du tribunal de grande instance de Lille, venus soutenir ce 8 décembre nos trois collègues ayant fait l’objet d’une manipulation particulièrement odieuse dans le prétendu documentaire Le mur.

Les extraits des entretiens auxquels se sont prêtés de bonne grâce nos amis ont été manipulés d’une façon telle que le sens des propos en a été dénaturé au point de faire entendre le contraire de ce qu’ils pensent et ont exprimé. Une voix off scande les séquences pour donner aux propos tenus un accent contraire à l’esprit de ce qui est exprimé. Un procédé particulièrement fallacieux qui ne trompe pas l’auditeur éclairé mais coule depuis deux mois avec un goût de mauvais vinaigre sur la toile de l’internet.

Alexandre Stevens, Esthela Solano et Eric Laurent – pour sa part retenu en Argentine pour de nobles et psychanalytiques travaux – étaient venus demander le retrait des extraits dans lesquels ils apparaissent, avec l’aide de leur Conseil, Maître Christian Charrière Bournazel, qui les a défendu avec sobriété et grand talent. L’audience s’est déroulée avec sérénité en présence de quelques dizaines de soutien à Sophie Robert, réalisatrice du film et sous la férule d’une Présidente de tribunal qui n’entendait souffrir aucune manifestation d’humeur de la salle. Un bruissement s’est fait entendre lorsque l’avocat de nos collègues a fait valoir la domestication propre aux thérapies comportementales, bruissement immédiatement réfréné par la Présidente, visiblement irritée par les quelques calicots aperçus à l’entrée du tribunal.

Dès l’entrée de sa plaidoirie Maître Charrière Bournazel précise : “nous ne sommes pas ici pour faire le procès de l’autisme, nous sommes là pour ce qui concerne le droit moral, le droit à l’image et le droit au retrait lorsque ces droits fondamentaux ont été bafoués”.

Il présente alors les psychanalystes comme des personnes qui tentent de résoudre les douleurs de l’âme avec humilité tout en faisant valoir la formation robuste et la notoriété particulière de ses clients.

Il démonte ensuite calmement comment Sophie Robert s’est présentée pour réaliser un film qui s’intitulerait “Voyage dans l’inconscient” et comment elle a interviewé nos collègues en leur laissant croire à un travail de documentariste alors même que l’objectif était de soulever une polémique partisane en faveur des thérapies comportementales. Quelle ne fut pas la stupeur de nos collègues en découvrant que le titre du film fut ainsi changé en “Le mur”, sous-titré “La psychanalyse à l’épreuve de l’autisme”.

Avec quelques exemples et faisant valoir la saisie des rush qui ont pu être exploités pour démonter la supercherie, il montra que depuis l’interview originale jusqu’au propos encadré par la voix off et quelques titres chocs, une torsion s’était opérée qui dénaturait profondément la teneur et la rigueur des propos énoncés.

On n’a pas le droit de faire dire à quelqu’un ce qu’il n’a pas dit et il est tout à fait clair  concernant Mr Stevens, a t-il déclaré, que, concernant la mise en cause de la relation maternelle le film fait dire au psychanalyste le contraire de ce qu’il dit, de ce qu’il pense et de ce qu’il écrit dans ses travaux.

Ainsi était enfin fait un sort au sempiternel reproche adressé aux psychanalystes qui considéreraient coupable la relation maternelle dans l’autisme. “Je n’en crois rien” avait déclaré le Dr Stevens dans une conférence – ironie de l’histoire – prononcée à Lille même cinq ans plus tôt et heureusement transcrite dans la revue des Feuillets du Courtil. “La culpabilité qui porte sur les parents d’enfants autistes est une culpabilité qui vient d’abord  de l’idée psychologique que ce qui arrive à l’enfant vient des parents. Je n’en crois rien.”(1)

Suivit la plaidoirie de l’avocat de Sophie Robert qui se noya dans un autre procès, celui des TCC contre la psychanalyse, ce qui eut le don d’irriter la Présidente, plaidoirie relayée par celle de l’avocate d’Autisme sans frontière, association commanditaire du film. Tout était dit jusqu’à cette faute coupable où la brillante avocate se saisit d’extraits du film sans s’apercevoir qu’il ne s’agissait en aucun cas des propos des clients de Maître Charrière Bournazel. Celui-ci attrapa la forfaiture au vol pour l’épingler tel un papillon agonisant entre le mensonge et la fable.

Verdict le 26 janvier

(1) Stevens Alexandre, Aux limites du lien social, les autismes” Les Feuillets du Courtil, 29, janvier 2008.

Tagged with:
 

Comments are closed.